Paroles et traduction de la chanson « Ann Distro Euz A Vro-zaoz» par Tri Yann

Explications données par le groupe :
Parmi les rares chansons populaires qui gardent leur actualité malgré l'évolution urbaine des mentalités, celles qui traitent d'événements militaires occupent une place privilégiée. Elles prouvent en effet le ridicule de l'attitude militariste, héritage anachronique du Moyen Age et de l'Antiquité.
Témoin Kerfank 1870, témoin aussi l'histoire de Silvestik, chevalier breton et mercenaire de Guillaume le Conquérant qui avait promis une forte solde et le pillage de l'Angleterre à ceux qui l'accompagneraient dans sa conquête. Brian et Alan, fils du Comte Eudes et de la "Duchesse" Edwije, menaient le contingent breton.
Cette chanson, publiée dans le Barzaz Breiz en 1841, aurait été composée à l'époque de la conquête.

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Etre parrez Pouldergat ha parrez Plouare,
Entre la paroisse de Pouldergat et la paroisse de Plouaré,
Ez euz tudjentil iaouang o sevel eunn arme
Il y a de jeunes gentilshommes qui lèvent une armée pour aller à la guerre,
Evit monet d'ar brezel, dindan mab ann Dukez,
sous les ordres du fils de la Duchesse,
En deuz dastumet kalz tud euz a beb korn a Vreiz;
qui a rassemblé beaucoup de gens de tous les coins le la Bretagne;

Evit monet d'ar brezel, dreist ar mor, da Vro-zoz.
Pour aller à la guerre, par delà la mer, au pays des Saxons.
Me'm euz ma mab Silvestik e ma int ouz he c'hortoz,
J'ai mon fils Silvestik qu'ils attendent;
Me'm euz ma mab Silvestik ha n'em euz nemet-han
j'ai mon fils Silvestik, mon unique enfant,
A la da heul ar strollad, gand marc'heien ar ban.
part avec l'armée, à la suite des chevaliers du pays.

Evit monet d'ar brezel, dindan mab ann Dukez,
Pour aller à la guerre, sous les ordres du fils de la Duchesse,
Evit monet d'ar brezel, dreist ar mor, da Vroz-zoz.
Pour aller à la guerre, par delà la mer, au pays des Saxons

Eunn noz e oann em gwele, ne oann ket kousket mad,
Une nuit que j'étais couchée, et que je ne dormais pas,
Me gleve merc'hed Kerlaz a gane son ma mab;
j'entendis les filles de Kerlaz chanter la chanson de mon fils;
Ha me sevel em'c'haonze raktal war ma gwele :
et moi de me lever aussitôt sur mon séant:
- Otrou doue ! Silvestik, pelec'h oud-de breme ?
- Seigneur Dieu ! Silvestik, où es-tu maintenant ?

Marteze em oud ouspenn tric'hant ieo deuz va zi
Peut-être es-tu à plus de trois cents lieues d'ici,
Petolet barz ar mor braz d'ar pesked da zibri;
ou jeté dans la grande mer, en pâture aux poissons.
Mar kerez bea chommet gant da vamm ha da dad,
Si tu eusses voulu rester près de ta mère et de ton père,
Te vize bet eureujed breman, eureujed mad;
tu serais marié maintenant, bien marié;

Achuet oa ann daou vloaz, achuet oa ann tri :
Deux ans s'écoulèrent, trois ans s'écoulèrent:
- Kenavo d'id, Silvestik, ne n'az gwelinn ket mui;
- Adieu, Silvestik, je ne te verrai plus.
Mar kaffenn da eskern paour tolet gand ar mare,
Si je trouvais tes pauvres petits os, jetés par la mer au rivage,
Oh ! me ho dastumefe hag ho briatefe...
oh! je les recueillerais, je les baiserais

Ne oa ked he c'homz gant-hi, he c'homz peurlavaret,
Elle n'avait pas fini de parler,
Pa skoaz eul lestr a Vreiz war ann ot, hen koliet,
qu'un vaisseau de Bretagne vint se perdre à la côte;
Pa skoaz eul lestr a Vro penn-da-benn dispennet,
qu'un vaisseau du pays, fracassé de l'avant à l'arrière,
Kollet gant-han he raonnou hag he wernou breet.
sans rames, les mâts rompus, se brisa contre les rochers.

Leun a oa a dud varo ; den na ouffe lavar,
Il était plein de morts; nul ne saurait dire
Na gout pe gelt zo amzer n'en deuz gweiet ann douar.
ou savoir depuis combien de temps il n'avait vu la terre;
He Silvestik ao eno, hogen na mamm na tad,
et Silvestik était là; mais ni père, ni mère, ni ami, hélas!
Na mignon n'en doa, siouaz ! karet he zaou-iagad'.
n'avait aimé ses yeux!