La tête est un curieux organe
Curieusement organisé
Y'a qu'à voir quand on vous trépane
Général'ment c'est malaisé
Voici l'histoire singulière
D'un certain Mathurin la fleur
Dont le crâne assez ordinaire
N'était bizarr' qu'à l'intérieur
Ce type souffrit dès sa jeunesse
D'un mal en vérité courant
D'une mémoire assez traîtresse
Pour causer des désagréments
Sitôt qu'il apprenait un' chos'
Dans sa famille ou au lycée
Mathurin la mine morose
Instantanément l'oubliait
Oui mais, oui mais…
Il avait vite oublié d'oublier
Ce qu'il devait oublier
Alors comme il avait oublié d'oublier
Il se le rappelait en entier
Cette faculté trop rapide
Loin de le faire en société
Considérer comme stupide
Lui donnait la priorité
Oubliant d'oublier ses cours
Mathurin les retenait tous
Et malgré son cerveau tout gourd
Devint agrégé sans secousses
Mais un jour qu'il pleuvait averse
Et qu'il courait vers le métro
Butant contre un coureur adverse
Il s'abattit comme un perdreau
Son crâne porta sur la pierre
Avec un beau bruit musical
Produisant en sa cafetière
Un bouleversement fatal
Et désormais…
Il oubliait d'oublier d'oublier
Ce qu'il devait oublier
Et comme il oubliait d'oublier d'oublier
Il ne se le rappelait jamais
Vidé par cet accident bête
De ses souvenirs de toujours
Il repartit place des fêtes
Lui qui habitait à Cherbourg
Mais en chemin, déveine infâme
Un autobus qui s'emballa
Sans souci de sa charge d'âmes
Devant Mathurin déboula
Ayant oublié l'existence
Des autobus et du danger
Notre héros fleur d'innocence
Donna dans le monstre enragé
Mourant sous les roues carnassières
Dans son crâne vague il sentit
Une distorsion étrangère
Avant de connaître l'oubli
Et puis et puis…
Il oublia d'oublier d'oublier d'oublier
Qu'il devait oublier
Ce qu'il oubliait ait d'oublier er D'oublier
Qu'il venait de se rappeler
(parlé)
J'ai oublié la fin