ARRETEZ LES AIGUILLES
Riches ou pauv's quoi qu'on fass' sur la terre
Notre existence est un'chose éphémère
Et des pendul's le tic-tac incessant
Semble nous dir' tout passe avec le temps
Voici l'enfant qui vient de v'nir au monde
Sa mèr'penchée vers sa petit' têt' blonde
Vers la pendul' placée près de son lit
Jette un regard et soucieuse se dit :
REFRAIN
Si l'on pouvait arrêter les aiguilles
Au cadran qui marqu'les heur's de la vie
Nos p'tits enfants si mignons, si gentils
N'grandiraient pas pour déserter leur nid
Lorsqu'a vingt ans un jour ils se marient
Sans un regret ils part'nt et vous oublient
Et les mamans dont ils brisent l'espoir
Pens'nt : on voudrait près d'soi toujours les voir
Rester petits garçons ou petit's filles
Si l'on pouvait arrêter les aiguilles
COUPLET 2
Un malfaiteur, pour expier son crime,
Est condamné au châtiment ultime,
Dans sa cellule, il entend ses gardiens,
Dire tout bas : "Ce sera pour demain",
Le lendemain il voit que l'aube se lève,
Et ses idées se brouill'nt comme dans un rêve,
Il s'est secoué de terreur et d'remords,
Et dit tremblant sentant venir la mort,
REFRAIN
Si on pouvait arrêter les aiguilles,
Au cadran qui marque les heures de la vie,
J'n'aurais p't'êtr' pas lorsque sonnait minuit,
Commis le crime dont je vais être puni,
Il a suffit d'un' fatale minute,
Pour que d'un homme je devienne une brute,
Mais quoi voici l'horloge de la prison,
Qui sonn' le glas de la séparation,
Plus qu'un espoir, mon Dieu pour ma famille,
Si l'on pouvait arrêter les aiguilles.
COUPLET 3
Dans les campagnes ainsi que dans les villes,
Règne le calme et chacun vit tranquille,
Sans se douter qu'un orage gronde au loin,
Pour boul'verser la paix du genre humain,
Un peu partout, en Europe, en Afrique,
Les noirs dessous de l'infâme politique,
Sèment la guerre, horreur de tous les temps,
Que nul ne peut arrêter et pourtant,
REFRAIN
Si on pouvait arrêter les aiguilles,
Au cadran qui marque les heures de la vie,
On entendrait plus le tocsin sonner,
Pour enlever nos fils à leur foyer,
Quand à l'instant où tous les bras travaillent,
Quoi de plus triste que l'heure des batailles,
Peut-êtr' qu'un jour retrouvant sa raison,
L'homm' maudira la guerre et ses passions,
Plus de tueries, ni d'homm's qui se fusillent,
Si l'on pouvait arrêter les aiguilles.
COUPLET 4
Tous emportés par l'effroyable ronde,
Les années passent si vit' pour tout l'monde,
Que l'on se dit : pourquoi se jalouser,
Se fair'tant d'mal au lieu de s'entraider,
Deux pauvres vieux, usés, cassés par l'âge,
Sentant venir l'heure du grand voyage,
Encore unis, comm' dans leur jeune temps,
Dans un baiser disent en s'enlaçant :
REFRAIN
Si on pouvait arrêter les aiguilles,
Au cadran qui marque les heures de la vie,
Nous n'aurions pas la triste appréhension,
D'entendre l'heur' de la séparation,
Après avoir passé tout' une vie,
A nous chérir sans aucun'jalousie,
Le coeur bien gros, on n'devrait pas penser,
Qu'un jour hélas il faudra nous quitter,
Vivons d'espoir, à quoi bon s'fair' tant d'bile,
Puisqu'on ne peut pas arrêter les aiguilles.