A Quoi Je Sers... (A Quoi Je Sers...)
Avec ce titre de Mylene, on n'est pas très loin de l'existentialisme d'un Sartre ou d'un Kierkegaard, qui accordent une importance primordiale à la recherche de la vérité sur soi-même.
En premier lieu, le titre, plutôt que de se présenter sous forme d'une question, est achevée par trois petits points (ou points de suspension, je sais... ). Ceci nous laisse présager, non seulement un questionnement autour de ce à quoi Mylene sert, mais sous-entend qu'elle en a la réponse ! (lé tro forte, Mymy ! ^^)
En effet, la réponse nous est donnée quelques lignes plus bas : "Je sers... à rien du tout" ! Autant le dire, Mylene a l'air d'avoir le bourdon et se pose beaucoup de questions métaphysiques.
Tout commence avec la référence à Luc Dietrich, poète du XXe siècle, dont l'oeuvre "L'Apprentissage de la vie" comporte ces mots-ci :
"Alors le destin de l'humanité tout entière m'apparut dans ce mouvement de mauvaise marée : destins fondus dans le même glissement, destins lâchés par milliards comme poussières vivantes".
Mylene reprend ce vers à sa manière : "Poussière vivante / Je cherche en vain ma voie lactée".
Cette métaphore évoque la recherche d'une raison de vivre (voie lactée), mais cette quête est... vaine.
Elle ajoute à cela que "Dans [sa] tourmente / [Elle n'a] trouvé qu'un mausolée". Un mausolée est un monument funéraire. Autrement dit, Mylene, désespérée, reçoit un signe, lui indiquant que le seul destin (la voie lactée) qu'elle puisse atteindre est la mort.
Cela la rend folle ("je divague"), elle a peur de ce destin : "j'ai peur du vide" (où le vide = la mort). Elle "tourne des pages mais... des pages vides". Ceci suggère que son sentiment actuel se résume au néant : elle a l'impression de n'avoir rien vécu. Quand on dit "je tourne la page", cela signifie qu'on passe outre un évènement, et qu'on tente de l'oublier. Or, Mylene n'a rien à oublier, n'a rien vécu et se sent désespérément inutile et improductive.
Une seconde référence à Luc Dietrich est décelable dans le second couplet :
" Chaque heure demande pour qui / Pour quoi se redresser". Dietrich écrit, quant à lui : "Je suis comme celui dont les mains saignent à se raccrocher, dont les tendons cèdent. Et même si je parvenais à me redresser, pour quoi, pour qui ? A quoi cela servirait-il ? "
Mylene tente donc de se raccrocher à un espoir, de se dire qu'elle n'est peut-être pas si inutile, et que quelqu'un ou quelque chose a peut-être besoin d'elle ! ...
Mais non : chaque heure lui répond qu'il n'y a rien ni personne qui n'ait besoin d'elle.
"J'ai peur du vide / Pourquoi ces larmes ? / Dis, à quoi bon vivre ? " Ici, Mylene soliloque, et comprend : le vide (=la mort) est inévitable, c'est pourquoi elle pleure et se dit, finalement, que la vie ne vaut rien puisqu'elle s'achève quoiqu'il en soit.
De ce constat, Mylene réalise qu'elle est en train de sombrer : "mais mon dieu de quoi j'ai l'air". Elle a honte de larmoyer comme ça, et cela la conforte dans son idée : "je sers à rien du tout". Elle juge que le monde est un "enfer", où personne ne peut lui dire "ce qu'on attend de nous". Elle espère donc qu'une main charitable viendra lui porter secours et lui dire pourquoi elle est là.
"A présent je peux me taire si tout devient dégoût" ecoeurée par tout cela, Mylene décide d'en finir (se taire = mourir).
Et c'est précisément ce qu'elle fait dans la chanson.
"Poussière brûlante, la fièvre a eu raison de moi" : cette phrase sous-entend qu'elle est tombée malade, complètement sous le choc, et qu'elle en est peut-être morte ("a eu raison de moi" = m'a tuée ou alors m'a consumée dans le sens de "je suis devenue folle").
"Je ris sans rire, je vis, je fais n'importe quoi" : dans la mort (ou la folie ? ), Mylene finit par trouver un certain repos, une certaine joie, elle s'amuse comme une enfant... mais ses rires sont faux ("je ris sans rire") car elle sait que la mort n'est pas loin, et qu'elle n'a toujours pas trouvé de sens à sa vie.
"Et je divague, J'ai peur du vide, Je tourne des pages, Mais... des pages vides" de nouveau, Mylene se sent oppressée et insignifiante.
Parallèlement, on peut parler du clip de cette chanson. Il fait référence à la légende du Styx, dans la mythologie grecque.
Qu'est-ce que le Styx ? C'est le fleuve des morts, gardé par Charon (le passeur, qui est présent dans le clip et qui ne revient qu'avec la valise de la chanteuse à la fin). Charon transporte les morts d'une rive à l'autre (sur l'autre rive se trouvent le royaume des morts et Hadès), mais seuls ceux qui ont été inhumés richement et dont on a empli la bouche d'une obole (monnaie grecque) peuvent être charriés sur la barque (l'obole sert à payer Charon).
C'est précisément ce qui se passe avec Mylene, qui rejoint, sur l'autre rive, tous les héros de ses anciens clips (la rivale de Libertine ; Razoukine, son amant dans Tristana ; le capitaine de PQSD ; le marionnettiste de Sans Contrefaçon ; et le matador de Sans Logique).
On en déduit qu'elle trouve un sens à sa vie grâce à l'univers qu'elle a créé, et grâce aux personnages de cet univers.
Poussière vivante
Poussière vivante
Je cherche en vain ma voie lactée
Je cherche en vain ma voie lactée
Dans ma tourmente
Dans ma tourmente
Je n'ai trouvé qu'un mausolée
Je n'ai trouvé qu'un mausolée
Et je divague
Et je divague
J'ai peur du vide
J'ai peur du vide
Je tourne des pages
Je tourne des pages
Mais... des pages vides
Mais... des pages vides
Poussière errante
Poussière errante
Je n'ai pas su me diriger
Je n'ai pas su me diriger
Chaque heure demande pour qui,
Chaque heure demande pour qui,
Pour quoi, se redresser
Pour quoi, se redresser
Et je divague
Et je divague
J'ai peur du vide
J'ai peur du vide
Pourquoi ces larmes
Pourquoi ces larmes
Dis... à quoi bon vivre ?
Dis... à quoi bon vivre ?
[Refrain]
[Refrain]
Mais mon Dieu de quoi j'ai l'air
Mais mon Dieu de quoi j'ai l'air
Je sers à rien du tout
Je sers à rien du tout
Et qui peut dire dans cet enfer
Et qui peut dire dans cet enfer
Ce qu'on attend de nous, j'avoue
Ce qu'on attend de nous, j'avoue
Ne plus savoir à quoi je sers
Ne plus savoir à quoi je sers
Sans doute à rien du tout
Sans doute à rien du tout
A présent je peux me taire
A présent je peux me taire
Si tout devient dégoût
Si tout devient dégoût
Poussière brûlante
Poussière brûlante
La fièvre a eu raison de moi
La fièvre a eu raison de moi
Je ris sans rire
Je ris sans rire
Je vis, je fais n'importe quoi
Je vis, je fais n'importe quoi
Et je divague
Et je divague
J'ai peur du vide
J'ai peur du vide
Je tourne des pages
Je tourne des pages
Mais... des pages vides
Mais... des pages vides
[Refrain]x3
[Refrain]x3
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