LAURENT : La chasse à la sorciÚre a duré plusieurs semaines. Mon frÚre, en
remontant lâUbangi, a fini par trouver sa pĂ©troleuse prĂšs du vieux dolmen, dans la
forĂȘt des ronces oĂč lâĂ©pine et le chardon emmĂȘlĂ©s ne permettent pas le passage.
Ce sont des voix dâanges qui sont parvenues jusquâĂ lui, et quâil a suivies, comme
envoûté par le chant des sirÚnes. Saine et sauve, la sorciÚre était rentrée dans sa case
aux coins obscurs oĂč loin des foules inquisitrices, elle aimait couver ses pensĂ©es et
loger ses rĂȘves en filant la quenouille. Dans son refuge, elle recueillait les enfants
pygmées dont les parents avaient disparu dans les flammes des gigantesques
feux de déboisement. Elle avait monté une chorale avec eux. Il y a beaucoup
dâanimaux aussi qui passaient sur le site pour se rafraĂźchir dans les eaux de la
riviĂšre. La disparition progressive du couvert forestier dĂ©glinguait complĂštâment la
mĂ©tĂ©o, le mercure nâarrĂȘtait pas de grimper et yâ fâsait parfois une chaleur Ă crever.
Ă la maison heureusâment on avait la clim, sinon je ne sais pas comment jâaurais
fait, jâai tellâment dâ mal Ă supporter la canicule. Mon frĂšre avait complĂštement
dĂ©laissĂ© ses pliages pour se consacrer Ă lâinstallation de rampes de brumisation
dans les sous-bois. Ainsi, sous les caresses des fines gouttâlettes portĂ©es par les
airs brĂ»lants, Philippe et la sorciĂšre coulaient des jours heureux avec leur chĆur
dâorphelins. Mon faux jumeau avait trouvĂ© sa nouvelle moitiĂ©. Sauf que cette fois,
câest pas que lui qui commandait.
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