Paroles de la chanson «Bleu Fantôme» par Paul Et Mickey

Je m'enlise dans la sève
Moque mes hématomes
Songes à tous ceux qui s'entêtent
A ceux qui jouent au mieux le rôle
A ceux qui jouent au mieux le rôle
Je passe bleu fantôme
Je passe

La métaphore de la première phrase avec le mot "sève" renvoie à un arbre, ce qui laisse penser que ce dont l'auteur veut ici nous parler c'est de ses racines. Ses origines, ce qu'on appellerait en sociologie ses déterminismes. Il parle de s'y "enliser", on peut donc en déduire qu'il ne parvient pas à s'extraire de son nid. Peut-être même qu'il s'y réfugie en réaction à un premier contact avec le monde extérieur qui serait violent "moque mes hématomes" ?C'est l'hypothèse qu'on peut faire après une lecture intégrale du texte, nous y reviendrons.
En poursuivant ce préalable "ceux qui s'entêtent" et "ceux qui jouent au mieux le rôle" seraient dans ce cas ceux qui contrairement à l'auteur s'adaptent à leurs nouveaux environnements, qui y excellent, qui y trouvent leur place, leur rôle.

Ni de rouille, ni dorée
Tout juste tenant la corde
Brûlé au second degré
Le ciel quand même que l'on implore
Le ciel quand même que l'on implore
Je passe bleu fantôme
Je passe

Avec le "ni de rouille, ni dorée" l'auteur nous signifie qu'il ne se considère ni comme le plus mauvais ni comme le meilleur, ni périmé, ni particulièrement brillant, c'est un garçon moyen.
Est-ce de cela qu'il nous parle lorsqu'il parle de "Tout juste (tenir) la corde" ?Parvenir tout juste à suivre la norme, à ressembler au groupe majoritaire de manière à y être accepté, à s'y fondre ?
Son sentiment d'être différent est-il l'origine de sa souffrance ?
En même temps il y a un jeu de sonorité et d'ambiguïté avec "tenant la corde", en effet on peut aussi entendre "tenant l'accord" ce qui est un procédé musical. Est-ce la musique qui l'aide à survivre dans la jungle sociale hostile qu'il nous décrit ?
Troisième niveau de lecture pour "la corde" toujours, nous savons que dans les cours de récréation ont sévi un temps des jeux sinistres comme le jeu du foulard qui ont servi de prétexte à plus d'un pour se pendre. Est-ce une référence à la tentation du suicide dans la jeunesse de l'auteur ?

Peut-être un jour je serai fort
Il sera drôle d'avoir vécu
Avec à fleur de peau les nerfs
Et dans la bouche du sel de mer
Et dans la bouche du sel de mer
J'oublie, je pardonne
Je pardonne

Après s'être tourné vers le "ciel que l'on implore" le jeune homme nous parle d'un ailleurs, une autre fois où tout ira mieux. Un demain prometteur où toutes ses difficultés ne seront plus qu'un souvenir. Une forme d'espoir, d'horizon à construire où les névroses qui animent notre protagoniste n'auront pas disparues mais seront sans impact dans la situation nouvelle où il sera "fort" et où la pensée de ces étapes de sa vie le prêteront à sourire "il sera drôle d'avoir vécu avec à fleur de peau les nerfs".
Ici, par ailleurs, encore un jeu de sonorité avec "peau les nerfs" où la contraction de "peau" et "les" donne le son "Paul". Un nom qui habitera les chansons qui suivent dans le thème de l'introspection et qui deviendront un leitmotiv, une marque de fabrique pour le groupe.

Peut-être un jour je serai mort
Il sera si bon d'avoir cru
La foi brillante au bord des lèvres
Les cris chargés de prières
Les cris chargés de prières
Je passe bleu fantôme
Je m'efface

Enfin, la dernière strophe nous indique qu'il faut, selon l'auteur, voir au-delà des hématomes. En effet, il semblerait que soit exprimé ici tout autre chose que du regret "Il sera si bon d'avoir cru", "La foi brillante". "Les cris chargés de prières" nous confirme cette idée que dans la violence des cris on peut trouver de l'espoir, de la luminosité, l'attente d'un jour meilleur.
Adrien émet l'idée que malgré son lot de souffrance, le monde est juste et parfait. Il fait confiance à la vie et tâche d'en saisir les messages. Dans le sens où rien n'arrive pas hasard, où l'on se relève de tout et où l'on apprend de ses chutes. Si l'on passe par telle ou telle épreuve c'est pour en convertir l'énergie négative en énergie positive, pour faire quelque chose de constructif même des heures les plus sombres.