Voir le nombril d'la femm' d'un flic
N'est certain'ment pas un spectacle
Qui, du point d'vu' de l'esthétiqu',
Puiss' vous élever au pinacle...
Il y eut pourtant, dans l'vieux Paris,
Un honnête homme sans malice
Brûlant d'contempler le nombril
D'la femm' d'un agent de police...
"Je me fais vieux, gémissait-il,
Et, durant le cours de ma vie,
J'ai vu bon nombre de nombrils
De toutes les catégories:
Nombrils d'femm's de croqu'-morts, nombrils
D'femm's de bougnats, d'femm's de jocrisses,
Mais je n'ai jamais vu celui
D'la femm' d'un agent de police...
"Mon père a vu, comm' je vous vois,
Des nombrils de femm's de gendarmes,
Mon frère a goûté plus d'un' fois
D'ceux des femm's d'inspecteurs, les charmes...
Mon fils vit le nombril d'la souris
D'un ministre de la Justice...
Et moi, j'n'ai même pas vu l'nombril
D'la femm' d'un agent de police..;"
Ainsi gémissait en public
Cet honnête homme vénérable,
Quand la légitime d'un flic,
Tendant son nombril secourable,
Lui dit: "Je m'en vais mettre fin
A votre pénible supplice,
Vous fair' voir le nombril enfin
D'la femm' d'un agent de police..."
"Alleluia! fit le bon vieux,
De mes tourments voici la trêve!
Grâces soient rendu's au Bon Dieu,
Je vais réaliser mon rêve!"
Il s'engagea, tout attendri,
Sous les jupons d'sa bienfaitrice,
Braquer ses yeux, sur le nombril
D'la femm' d'un agent de police...
Mais, hélas! il était rompu
Par les effets de sa hantise,
Et comme il atteignait le but
De cinquante ans de convoitise,
La mort, la mort, la mort le prit
Sur l'abdomen de sa complice:
Il n'a jamais vu le nombril
D'la femm' d'un agent de police...